Une comparaison entre les PME françaises, allemandes et américaines

Cet article est paru dans une version plus courte le 15 février 2015 dans Globaliznow.com

 

Biscuiterie La Mère Poulard
Une PME qui exporte à petite échelle – Biscuiterie La Mère Poulard

 

Entre 1980 et 2013, la part de la France dans les exportations mondiales est passée de 5,7 % à 3,1 % 1). Pourtant, en dehors de l’industrie du luxe, la France a bien des entreprises innovantes qui marchent à l’export.

James Cameron a confié les effets spéciaux de la suite d’Avatar à SolidAnim, une petite société basée en banlieue parisienne et à Angoulême. Sepro, une PME vendéenne, exporte son savoir-faire robotique dans le monde entier. Le Puy du Fou vient d’être primé aux Etats-Unis, meilleur parc d’attraction au monde. Quels sont les points communs des entreprises françaises qui réussisent à l’international ? Comment se différencie le made in France par rapport à des sociétés allemandes ou américaines de même taille? Voici une comparaison entre PME françaises, allemandes et américaines.

Des PME sous le signe de l’Innovation et de la Technique

SolidAnim a attiré l’attention de Cameron grâce à un outil inédit qui permet l’insertion en temps réel des effets spéciaux. Le Puy du Fou est connu pour l’originalité et la qualité irréprochable de ses spectacles. Sepro fabrique des robots pour la plasturgie. L’industrie automobile, y compris BMW et Volkswagen, représente 75 % de sa clientèle. Une autre société vendéenne, Jeanneau, compte parmi les leaders mondiaux de la production de voilier.

Ces entreprises, exemples de réussite entrepreneuriale française, ont en commun leur taille humaine et un produit unique, le tout combiné à une qualité impeccable. Ce en quoi, elles sont absolument en ligne avec les PME allemandes exportatrices. Cela ne veut pas dire pour autant que les copies conformes aux PME allemandes sont seules garantes de succès à l’international. Au contraire, les PME françaises s’y distinguent par leurs qualités d’adaption et de réaction à l’imprévu, bien supérieures aux entreprises allemandes ou américaines.

Le manque de flexibilité en Allemagne

Il y a quelques années, Bongrain vendait discrètement du fromage à un discounter allemand. Les produits étaient vendus sans marque, tout le monde y trouvait son compte jusqu’au jour où le client se plaignit de trop hautes température au coeur des palettes. Le distributeur en Allemagne vérifia ses procédures, confirma qu’elles avaient été respectées et réfuta sa responsabilité dans la rupture de la chaîne de froid. C’est la mise en place de mouchards dans les camions qui livra la solution. A l’arrivée en Allemagne des camions réfrigérés, les chauffeurs du grossiste coupaient le moteur et la réfrigération en attendant le déchargement. Au vu des enregistrements, le distributeur s’attaqua à changer la procédure. Depuis ce jour, les camions ne doivent plus couper la réfrigération, même à l’arrêt.

Que s’est il passé ?

En face du problème, le manager allemand chez le grossiste a vérifié les procédures mises en place de longue date. Il a confirmé qu’elles étaient suivies, ce qui lui permettait de nier l’origine du problème chez lui. De l’autre coté, le commercial Grand Comptes a fait appel à son réseau bien établi dans l’usine. Par ses déplacements sur place, elle a souligné l’importance du problème et son appartenance à une équipe dédiée à le résoudre. Cette équipe, française, a finalement livré des faits au grossiste, allemand, avec lesquels celui-ci pouvait travailler.

Les Allemands aiment les faits, les présentations précises et étayées jusqu’au moindre détail. Une procédure est mise en place après avoir envisagé toutes les éventualités et avoir intégré dans le processus de décision toutes les personnes concernées. C’est une action qui prend du temps et qui implique beaucoup de ressources. Une fois une décision prise, il y a peu de marge pour des changements car tout changement signifie recommencer très bas dans la chaîne de réflexion.

Des Etats-Unis flexibles si c’est rentable

Du coté des Etats-Unis où le service clientèle est écrit avec un grand S, la flexibilité est vécue différemment. Anne, responsable informatique dans une société de conseil en technologie d’information travaille aux Etats-Unis depuis 13 ans. Elle y connaît bien le monde de l’entreprise, de Philadelphie à Las Vegas, en passant par Phoenix et Washington D.C.

„La culture d’entreprise ici est très orientée sur le résultat et le „time is money“ est omniprésent de la côte Est à Ouest. Je constate même une accélération du phénomène depuis la crise de 2008. La prise de décision est protocolaire mais même dans une grande société, que j’aime bien comparer à un paquebot, s’il faut tout changer en trois mois, et bien trois mois plus tard, le bateau est opérationnel à 70%. C’est sur l’eau et en navigant, que les derniers 30 % seront peaufinés.

Il faut noter aussi que la flexibilité en entreprise est souvent limitée au management. En face d’un employé dans une administration ou dans un magasin, la situation est bien différente. Aussi longtemps que vous rentrez dans les cases prévues par le manuel, aucun problème. Mais si vous sortez du processus, vous allez vous heurter à un mur. Oui, la capacité d’adaptation américaine est impressionnante. Mais ici, les entreprises sont flexibles aussi longtemps que cela leur rapporte de l’argent. Le client qui demande un changement, ne sera servi que sous perspective de retour sur investissement rapide. Et la flexibilité se fait au détriment de la qualité. Des projets comme le TGV ou le Concorde, ne sont possibles qu’en France où l’on aime le travail bien fait. Et pourtant, les Etats-Unis ont envoyé les hommes sur la lune et c’est d’ici que vient Google…“

Et la flexibilité des PME françaises ?

Les entreprises américaines s’adaptent aux circonstances si c’est rentable. Les sociétés allemandes ont du mal à bouger mais réagissent si on leur présente les bons chiffres. Et les françaises ? Jochen, vice-président d’une PME allemande dans l’agro-alimentaire travaille depuis 25 ans à l’international : „La flexibilité d’une entreprise dépend davantage de sa taille et du nombre d’échelons hierarchiques que de sa nationalité. Je vois peu de flexibilité chez Danone en comparaison avec Müller Milch* qui est significativement plus petit“. Les chiffres semblent lui donner raison : en 2013, 98% des PME allemandes exportaient contre seulement 35 % des françaises. Les PME françaises peuvent surmonter les obstacles en peaufinant leur anglais, en formant des équipes, en utilisant des réseaux et en exportant leurs innovations. Dans un monde des affaires américanisé, où la rentabilité court-terme passe avant tout, la flexibilité française est un atout. Profitons-en.

* Müller Milch est une société allemande qui transforme le lait et commercialise des produits laitiers
Source: 1) WTO

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